La posture d’allié·e dans le Mouvement ATD Quart Monde

Paroles d'acteurs·trices

Créons du lien humain basé sur du vivre ensemble

 

Nous souhaitons alimenter la réflexion au sein du réseau Festisol en approfondissant le concept d’alliance et ses grands principes, et surtout en abordant les manières de mettre en pratique la posture d’allié·e en tant qu’acteur·rice·s.

Après avoir abordé le sujet avec Lavinia Ruscigni, nous avons souhaité ouvrir la réflexion avec des personnes engagées du mouvement ATD Quart Monde pour comprendre au mieux la posture d’allié·e·s auprès des plus pauvres. Voici ce que nous ont confié Séverine Choquet, alliée à ATD depuis 18 ans et conseillère en insertion socioprofessionnelle, et Alain Havet, allié à ATD depuis 36 ans et chargé de recherche à l’INRAE.

 

La posture d’allié.e.s est avant tout une façon d’être

Pour Séverine et Alain, les fondements de la posture d’allié.e résident dans la capacité d’écouter, de poser des questions, de laisser venir les réponses, de se laisser conduire et de s’adapter aux personnes. 

“Ce n’est pas une fonction, c’est un engagement, une façon d’être avec des personnes qui connaissent la grande pauvreté, l’exclusion. C’est être avec eux pour qu’ensemble on puisse travailler, avec des connaissances différentes, pour lutter contre la misère.”

Comprendre les personnes premières concernées, c’est se donner la capacité de partir de ses personnes pour agir et créer du lien humain. C’est apprendre les un·e·s des autres, créer ensemble une parole pour qu’iels puissent accéder à leur droits.
En effet, on n’imagine pas forcément ce que vivent des personnes, même géographiquement proches de nous. Lorsqu’elles ne savent ni lire ni écrire, elles sont finalement dépendantes des autres. Mais pour s’en rendre compte, il faut prendre le temps d’échanger avec elles. 

 

Un engagement pour que les plus pauvres accèdent à leurs droits

S’engager en tant qu’allié·e auprès des plus pauvres, c’est les aider à faire entendre leur voix et à accéder à leurs droits

Cela peut consister à accompagner les personnes lors de démarches administratives. C’est également les soutenir dans l’engagement politique, non partisan, que mène ATD Quart Monde.  Il est aussi essentiel de les faire reconnaître dans les cercles de relations (amicaux, politiques, syndicaux, de parents d’élèves, …) afin qu’ils et elles accèdent à leurs droits, à toutes les échelles.  

Alain nous donne l’exemple de son engagement en tant que parent d’élève lors des conseils de discipline. En tant qu’allié, il a eu à cœur de prendre le temps d’échanger avec les parents et l’enfant concernés. Cette étape essentielle permet de prendre en compte le contexte socio-familial de l’enfant et de lui éviter des sanctions inadaptées voire contre-productives.  

 

La posture d’allié.e permet des projets réellement adaptés et utiles socialement

Pour Séverine et Alain, il est important d’adopter cette posture d’allié·e pour vraiment rencontrer l’autre. Grâce à cette rencontre, les projets construits ensemble sont réellement adaptés aux situations et priorités des personnes. Cette vision et cette approche des autres ont été un apport important dans leur vie personnelle et professionnelle

“C’est un apprentissage réciproque qui fait grandir chacun, grâce à nos richesses et nos connaissances différentes.” 

C’est aussi un moyen d’apporter des solutions à l’ensemble de la société. Par exemple, la CMU donne un accès gratuit aux soins pour les plus précaires. Mais au-delà, c’est bien toute la société qui en bénéficie, notamment car ainsi les maladies se répandent moins.
Il est alors essentiel de permettre aux personnes les plus pauvres de s’engager et de se battre pour leurs droits. 
Cependant, mettre en pratique cette posture d’allié·e n’est pas toujours simple. Il faut ainsi veiller à laisser aux personnes premières concernées des responsabilités pour qu’elles puissent s’intégrer dans la société.  Il est aussi nécessaire de sensibiliser notre environnement personnel et professionnel pour que cette posture puisse se diffuser.
Cela passe également par la valorisation des savoir-faire des personnes premières concernées par la pauvreté, afin de réfléchir avec elles et se nourrir de leurs expériences

Mettre en oeuvre la posture d’allié·e : l’exemple des Universités populaires ATD

Dans le mouvement ATD Quart Monde, la mise en pratique du concept d’alliance se nourrit des universités populaires Quart Monde. Ces temps d’échanges ont pour objectif de libérer la parole des plus pauvres sur ce qu’iels ont vécu. Cela passe par des “retranscriptions” par différents moyens (affiches, dessins, théâtre, écriture…) afin d’en faire des lieux de dialogue et de formation réciproque entre des adultes vivant en grande pauvreté et d’autres citoyens qui s’engagent à leurs côtés.

“J’ai découvert un autre monde. L’Université Populaire m’a permis de prendre conscience de toutes les batailles que mènent les gens pour exister.”

 

Un petit conseil pour les personnes intéressées par cette posture d’allié.e ?

En résumé, le plus important est de partir des autres. C’est d’accepter de prendre du temps pour aller au rythme de chacun·e, c’est de ne pas prévoir de chemin sans elles et eux pour avancer. Et surtout, cela ne marchera que si vous êtes convaincu·e de l’intérêt et l’importance du faire ensemble !

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